Début janvier se prête traditionnellement aux vœux de nouvel an. J’ai présenté mes meilleurs vœux à mes proches, famille, amis et autres collègues. Parce que je les aime pour certains, les apprécie pour d’autres et parce que, en tout état de cause, je leur souhaite le meilleur en ce début d’année.
J’aime le football en général et le football français en particulier. Je lui présente donc mes meilleurs vœux pour 2015, parce que j’espère également le meilleur pour lui. Mais il faut être réaliste: le meilleur pour le football français en 2015, ce n’est pas gagné, loin s’en faut.
Je lui souhaite tout d’abord et surtout de toujours faire primer le football sur l’économique
Pour qu’il puisse passer une bonne année, il me faut d’abord souhaiter au football français de s’évertuer à toujours faire prévaloir les valeurs du football, en tant que sport, sur celles du football en tant qu’activité économique. Et de ne jamais faillir dans cette tâche.
Je lui souhaite ainsi de ne plus jamais refuser la montée dans une division supérieure à un club l’ayant acquis sur le terrain. Ce qu’a vécu le club de Luzenac en 2014, qui avait mérité sur les terrains de l’hexagone l’accession en Ligue 2 et qui se l’ait vu refuser pour des raisons financières et/ou structurelles, n’est pas acceptable.
Aucune justification, d’aucune sorte, ne peut expliquer ce qu’a vécu ce club amateur, ses dirigeants, ses joueurs, ses salariés et ses supporters.
Si le football français devait avoir la tentation de se retrancher derrière des textes qu’il a lui même adoptés pour se dédouaner d’une décision qui restera comme l’une des plus insultantes que le football amateur aura eu à connaître, je lui souhaiterais alors ardemment de faire évoluer les textes en question.
Je lui souhaite également de prendre les deux décisions nécessaires pour rendre le football français économiquement plus attractif qu’il ne l’est aujourd’hui…
Car que le football français et ses dirigeants ne s’y trompent pas. Si Luzenac pouvait avoir des problèmes financiers – qui auraient en tout état de cause été réglés par l’obtention des droits TV auxquels l’accès à la Ligue 2 lui donnait droit – ils n’étaient finalement que proportionnels à la taille du club ariégeois.
En effet, la Ligue de Football Professionnel (LFP) dévoilera bientôt les chiffres de la saison 2013/14 et nous pouvons nous attendre de nouveau à des pertes impressionnantes des clubs de Ligue 1 et Ligue 2. Nous devrions ainsi apprendre d’une part que, cumulées, ces pertes devraient être de l’ordre de 93 millions d’euros soit en hausse de 138% par rapport à celles de la saison précédente.
Et nous devrions y apprendre d’autre part que la plupart des clubs sont toujours très fortement dépendants de ces mêmes droits TV dont Luzenac aurait pu bénéficier pour se mettre financièrement à niveau en Ligue 2.
En d’autres termes, le football français est économiquement malade, et ce n’est pas nouveau.
Il a besoin de s’ouvrir à de nouveaux investisseurs. Or, pour attirer ceux qui aujourd’hui investissent prioritairement dans les championnats allemand, anglais ou espagnol avant d’investir dans le championnat français, il faudrait modifier deux procédures ubuesques et qui n’ont plus de raison d’être.
…A savoir donner le numéro d’agrément des clubs aux pros et non plus aux amateurs…
La première consisterait pour la Fédération Française de Football (FFF) à enfin donner le numéro d’agrément leur permettant de s’aligner en championnat, aux sections professionnelles des clubs, et non plus à leurs sections associatives.
En effet, en France, un club professionnel a deux composantes. La première gère le secteur professionnel et est organisée sous forme de société commerciale. L’autre administre les amateurs ayant signé au club, des débutants aux membres du centre de formation (n’étant pas sous contrat) et est organisée sous forme d’association.
Demander à un investisseur d’injecter des millions d’euros dans des clubs, sociétés commerciales, tout en donnant la clé de leur business à l’association qui fait partie intégrante de leur club tout en étant juridiquement indépendante de la section professionnelle, est incongru.
Un investisseur a besoin d’être rassuré quant au devenir de son investissement. Or, lui expliquer qu’en France, contrairement à ce qui se passe dans la très grande majorité des autres pays européens, c’est en réalité la partie associative du club qui détient l’agrément de la FFF et qui a donc droit de vie et de mort sur le club (en ce compris sa section professionnelle), n’est pas la meilleure manière de convaincre de l’attrait économique de notre football.
Donnons cet agrément aux sections professionnelles des clubs, en d’autres termes aux investisseurs, et modifions les textes pour qu’en cas de faillite ou de disparition de ces sections professionnelles, l’agrément glisse naturellement aux sections associatives qui garantiront alors la pérennité des clubs en question.
…Et réformer le fonctionnement de la DNCG
Dans la même optique, la FFF et la LFP devraient réformer de manière urgente le fonctionnement de la Direction Nationale de Contrôle et de Gestion (DNCG) qui valide les comptes des clubs professionnels et amateurs. La DNCG doit s’assurer de la capacité des clubs s’engageant dans un championnat, de le jouer jusqu’à son terme. Si tel n’était pas le cas, ce serait la compétition dans son ensemble qui serait faussée. Ce contrôle est opéré de manière effective depuis une trentaine d’années.
Mais en aucun cas la DNCG ne devrait pouvoir s’immiscer dans la politique d’investissement des clubs comme elle le fait actuellement. Un dirigeant, si tant est qu’il assure la DNCG de la pérennité de son club et donc de la continuité des compétitions dans lesquelles il l’engage, devrait pouvoir rester seul maître de la gestion de son club et du niveau d’endettement qu’il juge nécessaire à un instant T pour la bonne marche de son projet.
Tel est le cas quasi partout en Europe, à l’exception notable de la France. Et il est aujourd’hui clair, sauf pour ceux qui ont fait de la cécité une politique à part entière, que le modèle de la DNCG tel qu’il fonctionne aujourd’hui est déficient. Il n’a donné que peu de résultats et n’en donne en tout état de cause plus depuis longtemps. Les clubs français restent structurellement et durablement déficitaires et le nombre de faillites est beaucoup plus important en France qu’il ne l’est chez nos voisins.
De plus, non seulement ce modèle ne fonctionne pas, mais, de surcroît, il rebute les investisseurs. Alors je souhaite au football français de pouvoir compter sur des dirigeants clairvoyants qui sauront changer de cap pendant qu’il en est peut-être encore temps.
Je lui souhaite finalement de croire en son équipe nationale
Finalement, les clubs français ont pour vitrine à l’étranger quelques très rares clubs. Certains diront qu’ils n’en ont plus qu’un, à savoir le PSG. Mais ils peuvent aussi compter sur l’équipe de France qui a su se réconcilier en 2014 avec son public. Réconciliation in extremis, à l’issue d’une victoire improbable contre l’Ukraine, mais réconciliation quand même.
Cette équipe de France est composée de véritables talents, tous sortis des centres de formation français. Elle a montré des qualités intéressantes lors de la dernière Coupe du Monde au Brésil et lors des derniers matches joués en 2014. Elle se préparera cette année à l’Euro 2016 qui aura lieu en France.
Je souhaite donc au football français que son équipe nationale puisse générer l’engouement à l’étranger que la Ligue 1 a du mal à susciter.
Bref, et comme je l’ai déjà dit, j’aime le football français. J’espère le meilleur pour lui. Le football français est en grande partie maître de son destin. Il n’appartient qu’à lui de prendre les décisions qui s’imposent pour qu’il puisse utilement s’ouvrir aux investisseurs extérieurs. S’il en avait le courage, c’est aux supporters et autres amateurs de football qu’il présenterait alors ses meilleurs vœux.
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