Le Brexit va-t-il tuer la Premier League ? De nombreux observateurs prédisent le pire au football anglais depuis le vote du Brexit le 23 juin 2016, et son activation le 30 mars 2017.
Ils partent en effet de l’idée qu’une fois les conditions du Brexit négociées entre l’Union européenne (UE) et le Royaume-Uni, les règles en vigueur concernant l’accueil des joueurs étrangers en Premier League seront les mêmes qu’aujourd’hui.
La première question qui se pose est dès lors simple : les joueurs européens évoluant actuellement en Premier League auront-ils besoin d’un permis de travail pour jouer en Angleterre une fois celle-ci ayant quitté l’UE ? Cette question agite tous les esprits. D’autant plus que les conditions fixées par la Fédération anglaise pour délivrer ces « sésames » sont pour le moins drastiques.
Un exode des joueurs européens ?
Pour obtenir ce fameux permis de travail, les joueurs hors UE doivent évoluer dans l’un des 50 premiers pays du classement FIFA et être internationaux. Si le pays est dans le Top 10 mondial, le joueur doit avoir joué 30% des matches de son équipe nationale. Entre la 11e et la 30e place, l’intéressé devra avoir joué 45% de ces matches, et entre la 31e et la 50e place, il devra avoir joué 75% d’entre eux.
Si les joueurs européens devaient passer par les mêmes critères demain, ceux qui ne les rempliraient pas seraient très nombreux. Et ils devraient alors quitter la Premier League. Au total, on estime que 75% des joueurs européens évoluant en Premier League devraient faire leurs valises. Dont bon nombre de joueurs prestigieux comme, par exemple Zlatan Ibrahimovic, qui évolue à Manchester United, tout en ayant pris sa retraite internationale avec la Suède. Il ne pourrait, du coup, pas comptabiliser le nombre de matches internationaux requis.
Un impact mondial
L’effondrement de la Premier League aurait un impact majeur sur le football mondial. La Premier League écrase économiquement les autres championnats nationaux, dont ceux des principaux pays européens, parce qu’elle regroupe en son sein de très nombreuses stars internationales, provenant des quatre coins de la planète. Ces stars alimentent des équipes produisant un football que l’on considère comme extraordinairement attractif et dont les droits TV s’arrachent à prix d’or partout dans le monde. Ces droits TV font des clubs anglais de véritables « machines de guerre » économiques, capables d’acquérir à prix d’or des joueurs talentueux en provenance de tous les continents.
C’est un cercle, vertueux ou vicieux selon les points de vue : l’argent attire les stars, qui attirent les télévisions, qui génèrent d’énormes recettes, que les clubs utilisent pour acquérir de nouvelles stars. Et ainsi de suite.
Les raisons d’être optimistes
La situation est-elle désespérée ? Non. Car la Fédération anglaise, soutenue par le gouvernement du Royaume-Uni, cherchera à adapter la situation au mieux de ses intérêts. Et il est probable qu’elle pourra sauver la situation.
Les chemins possibles sont nombreux. Soit le gouvernement britannique utilisera le chapitre social, concernant le traitement des travailleurs britanniques dans l’UE, ou celui des travailleurs de l’UE au Royaume-Uni. Le chapitre social figurera immanquablement dans l’accord bilatéral entre le Royaume-Uni et l’Union européenne, qui sera adopté une fois le Brexit devenu réalité. Soit une législation britannique, plus discrétionnaire, sera adoptée pour permettre aux joueurs européens de continuer à échapper à la nécessité d’obtention d’un permis de travail pour évoluer en Premier League.
Car tout est là. Aujourd’hui, le Royaume-Uni doit s’assurer que la législation britannique est conforme aux Traités européens. Ce ne sera plus le cas – du moins tant qu’un traité bilatéral n’aura pas été signé avec l’UE – une fois le Brexit négocié. Le Royaume-Uni ne sera plus contraint par Bruxelles dans son travail législatif et réglementaire.
Par conséquent, le devenir du football anglais sera décidé à Londres. Et nulle part ailleurs. Si bien que les règles gouvernant l’accueil des joueurs européens en Premier League évolueront. Elles ne seront plus les mêmes qu’aujourd’hui une fois le Brexit rentré en vigueur. Le Brexit est donc, de ce point de vue, un nouveau commencement pour la Premier League. Les enjeux sont réels. Mais on imagine mal le gouvernement et la Fédération anglaise renoncer à leur suprématie mondiale. Zlatan n’est pas près de faire ses valises.
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