SPORT – L’information a été communiquée hier par la FIFA : les clubs de football n’ont jamais dépensé plus en transferts de joueurs qu’en 2014. Ce sont au total quelques 3,6 milliards d’euros qui auront en effet transités de club à club pour financer un total de 13.090 transferts. Et il ne s’agit là que des transferts internationaux, puisque les transferts au sein d’un même pays échappent à la compétence et donc aux statistiques de la FIFA.
Ces chiffres semblent toutefois être mis à mal par ceux du mercato hivernal en cours, qui se clôturera le 2 février prochain à minuit. Même si l’on sait par expérience que les derniers jours, voire les toutes dernières heures des mercatos donnent lieu à une accélération frénétique du nombre d’accords entre clubs, la tendance semble être cette fois-ci fortement baissière.
Alors qu’en est-il vraiment ?
Evolution du nombre de transferts ces dernières années
La FIFA a mis en place en 2010 un système dit TMS pour « Transfer Matching System » qui permet aux clubs de, entre autres, s’assurer de la conformité de leurs accords avec la réglementation en vigueur et du bon enregistrement des joueurs d’une fédération nationale (qu’ils quittent) à l’autre (qu’ils rejoignent). Le TMS donne ainsi à la FIFA, d’une année sur l’autre, une vue globale du marché des transferts au niveau mondial.
Le premier rapport disponible à ce sujet date donc de 2011. Avant cette date, dirigeants, joueurs, journalistes et autres amoureux du football ne disposaient pas réellement de chiffres pour analyser le marché des transferts.
Ceux de 2014 sont donc fiables et ils montrent une hausse des montants versés d’un peu plus de 1% par rapport à ceux de 2013 (3,5 milliards €). La hausse est donc vérifiée mais elle est, cette fois-ci, loin d’être aussi spectaculaire que les différents commentaires lus ici ou là pourraient le laisser penser.
Nous pourrions nous appesantir sur les différents chiffres contenus dans le dernier rapport de la FIFA. Mais nous nous contenterons de souligner que cette hausse du nombre de transferts et des montants y afférents reste néanmoins constante puisqu’elle atteint, en moyenne sur la période 2011-2014, un peu plus de 3%.
Les riches contre les pauvres
Ces chiffres globaux masquent néanmoins des situations très diverses.
Au niveau géographique d’abord, l’Europe reste le premier marché de transferts de footballeurs puisque 87% des dépenses (soit 3,13 milliards €) y ont été effectués. L’Europe est, à cet égard, suivie de très loin par l’Amérique du Sud puis par l’Asie.
Toutefois, on est toujours le pauvre de quelqu’un et ceci est particulièrement vrai des différents championnats nationaux en Europe.
Le championnat anglais aura ainsi généré à lui tout seul 1,03 milliard € de transferts, soit plus du quart des dépenses mondiales et près du tiers des dépenses européennes. Sa domination du football mondial et européenne est telle qu’il aura aussi dépensé 61% de plus que l’Espagne, pourtant deuxième plus gros marché mondial avec quelques 611 millions €.
Si on parle d’une domination européenne au niveau mondial et d’une domination anglaise au niveau européen, on peut également évoquer une domination de quelques clubs seulement au niveau anglais. Il s’agit, en bref, de ceux dont les budgets avoisinent ou dépassent, tout compris, les 350 millions € (Arsenal, Chelsea, Liverpool, Manchester City et Manchester United) et qui seuls, aujourd’hui, peuvent prétendre remporter le championnat de ”Premier League”.
Ces derniers alimentent en toute logique le marché des transferts là ou des clubs aux budgets plus modestes comme Swansea (46 millions €), West Bromwich (64 millions €) ou Stoke City (74 millions €) n’en ont pas les moyens.
En d’autres termes, parler de records pour les dépenses de transferts de joueurs dans le monde, c’est comme parler de l’augmentation du patrimoine des plus riches sans se soucier de celui des plus pauvres. Hasard des calendriers, la FIFPro (syndicat international des joueurs de football professionnel) déclarait d’ailleurs la veille de la publication des chiffres de la FIFA qu’elle « est de plus en plus préoccupée par l’écart qui se creuse entre riches et pauvres dans le secteur du football et les problèmes économiques auxquels le football doit faire face malgré des revenus records ».
Car, effectivement, ne nous y trompons pas : ces chiffres ne concernent pas le football, mais un certain football.
Et en France ?
Les clubs français vivent en partie du transfert de leurs meilleurs joueurs. Les montants perçus ne cessent d’ailleurs d’augmenter passant pour la Ligue 1, selon la Direction Nationale de Contrôle et de Gestion (DNCG) de la Fédération Française de Football, de 182 millions € pour la saison 2010/11, à 199 millions pour la saison 2011/12, puis à 220 millions pour la saison 2012/13. Les chiffres de la saison 2013/14 ne sont pas encore connus mais ils devraient confirmer cette hausse.
Mais là ou la plupart des clubs auront eu à vendre pour survivre, le PSG aura quant à lui acheté pour se tailler la part du lion et accéder au gratin des clubs européens. Donc en France comme partout ailleurs dans le monde, se met en place un football à deux niveaux.
Le mercato hivernal se terminera dans quelques jours et selon toute vraisemblance, seuls les grands clubs, dont le PSG, réaliseront des opérations de transfert d’envergure. Et l’avocat que je suis, impliqué dans plusieurs centaines de transferts depuis des années, continuera à plus traverser la Manche, les Pyrénées et les Alpes qu’à sillonner les contrées françaises.
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