Hier le tirage de la Ligue des Champions a rendu son verdict : pour les 8ème de finale, ce sera donc PSG – Chelsea et Arsenal – Monaco. Les deux clubs français (ou plutôt de Ligue 1, car finalement l’AS Monaco est le club de la Principauté du même nom) joueront leur qualification contre Arsenal et Chelsea, deux clubs de Londres et de la très réputée Premier League.
Soyons clairs : les clubs français ne sont pas favoris. Et pour cause.
La Premier League écrase économiquement la Ligue 1
Ils évoluent tout d’abord dans des championnats qui n’ont plus grand chose en commun. Les derniers chiffres produits par l’Union des Clubs Professionnels de Football (UCPF) en France font ainsi état d’un chiffre d’affaires de la Premier League, hors transferts de joueurs, de 2.946 millions d’euros pour la saison 2012/13 lorsqu’il n’était que de 1.297 millions d’euros en France pour la même période.
En d’autres termes, le championnat anglais a généré un chiffre d’affaires 227% supérieur à celui de son homologue français.
De surcroît, les clubs de Ligue 1 disposant donc de recettes nettement inférieures à ceux de la Premier League, doivent également faire face à des charges bien supérieures à celles payées par leurs amis Anglais. Comme le souligne l’UCPF, le poids des charges sociales pour les clubs français est 5 fois supérieur à celui de leurs homologues anglais.
Moins de revenus, plus de charges, les clubs français peinent par conséquent à être compétitifs. Aucun n’est d’ailleurs à ce jour propriétaire de son stade. Pas plus le PSG que Monaco d’ailleurs. De l’autre côté de la Manche, plusieurs clubs détiennent leurs enceintes dont bien entendu Arsenal et Chelsea.
Il ressort de ce grand écart économique entre les championnats anglais et français, que la Premier League abrite conséquemment de nombreuses équipes de très haut niveau parmi lesquelles nous pouvons citer pêle-mêle outre Arsenal et Chelsea, Manchester City, Manchester United, Liverpool et Tottenham. Ce championnat riche et sportivement exaltant attire du coup les meilleurs joueurs, notamment Français, mais également pléthore de diffuseurs.
Il suffit pour s’en convaincre de noter que lors de la saison 2013/14, Manchester City champion d’Angleterre aura empoché 120 millions d’euros de droits TV alors que Cardiff City qui a terminé lanterne rouge de la Premier League aura quant à lui empoché la modique somme de 77 millions d’euros. Soit quasi le double de la somme (44 millions d’euros) empochée par… le PSG pourtant champion de France ! Ce qui fit d’ailleurs dire à l’UCPF qu’« il vaut mieux perdre la Premier League que de gagner la Ligue 1 ».
En termes de billetterie, il en est de même. En 2012/13, la Premier League faisait une recette en jours de matches de 682 millions d’euros là ou la Ligue 1 atteignait péniblement les 139 millions d’euros.
Nous l’aurons compris et il est nul besoin de continuer les comparaisons douloureuses : le football anglais domine économiquement le football français de la tête et des épaules.
Arsenal et Chelsea gagnent de l’argent, le PSG et Monaco en perdent
Si Chelsea a très longtemps été en perte, le club a clôturé son dernier exercice avec un bénéfice de 23 millions d’euros. Peut-être d’ailleurs aidé en cela par le PSG qui a acquis auprès des Blues le défenseur brésilien David Luiz pour quelques 50 millions d’euros.
Arsenal, qui a toujours été financièrement plus prudent que son voisin londonien, a quant à lui terminé l’exercice comptable précédent avec un bénéfice de 5,9 millions d’euros.
Au-delà du fait que ces deux clubs ont donc gagné de l’argent la saison dernière, ce qui est remarquable vu de France, ils ont également réalisé des chiffres d’affaires monstrueux, à savoir 406 millions d’euros pour Chelsea et 383,5 millions d’euros pour Arsenal.
De son côté, le PSG réalisa en 2012/13 un chiffre d’affaires de quelques 399 millions d’euros mais dont 233 venaient directement du Qatar là ou Monaco en réalisa un de… 15 millions d’euros (il évoluait alors en Ligue 2).
De plus, les règles du Fair-Play Financier de l’UEFA sont telles que les recettes qataries du PSG et russes de Monaco auront vocation à se tarir. Conséquemment, les efforts de rattrapage économique que ces deux clubs se proposaient de faire sur leurs homologues européens et notamment anglais, en seront très fortement freinés.
Bref, arrêtons avec les chiffres. Sauf que…
Il y a une corrélation certaine entre les finances des clubs et leurs performances sportives
Les difficultés des clubs français ne sont pas seulement financières. Elles sont également sportives. Ou plus exactement, c’est en grande partie parce que les clubs français ont des difficultés financières, qu’ils ont des difficultés sportives.
Les Français ont gagné une seule fois la Ligue des Champions (en 1993 avec Marseille) là ou les Anglais l’ont gagné 12 fois, dont la dernière fois en 2012 avec Chelsea. Ils ont de surcroît placé 7 fois un club en finale lors des 10 dernières éditions de cette compétition.
La France et ses clubs ont donc progressivement chuté à l’indice UEFA, passant de la deuxième place en 1995 avant l’arrêt Bosman, à la sixième place aujourd’hui. Durant cette même période, l’Angleterre sera passé de la cinquième place à la deuxième, juste derrière l’Espagne.
Certes, les Français raffolent des exploits des petits contre les grands. La Coupe de France est par exemple chaque année l’occasion pour les amateurs de battre des professionnels, pour les journalistes de vanter les mérites des valeurs purement sportives sur les valeurs économiques et pour les puristes de regretter le temps où le football était moins élitiste.
Sauf que ce sont souvent les mêmes qui, les mercredi soirs devant leurs écrans, moquent les performances du football français dans les compétitions européennes, ne voyant d’ailleurs pas dans leurs propos la moindre contradiction.
En d’autres termes, les Anglais auront su s’adapter au foot business là ou les Français, gênés par leur approche constamment dirigiste de l’économie, auront pensé à tort pouvoir encadrer les clubs de football et leurs activités. En oubliant qu’à vouloir modeler leur fonctionnement, nos dirigeants freinaient en réalité leur développement.
Ce modèle a échoué. Il faut en changer.
Mais en attendant, Monaco et surtout le PSG vont joueur leur chance à fond contre Arsenal et Chelsea. Et si les clubs français ne peuvent certainement pas rivaliser sur la durée avec leurs homologues anglais, ils peuvent les battre sur une rencontre aller-retour. Parce que le foot reste le foot.
Un Anglais (même riche) averti, en vaut deux.
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