Une récente étude menée par des économistes allemands met à mal le système du Fair-Play Financier. Mis en place pour tenter d’empêcher le gouffre financier séparant les grandes écuries européennes des clubs du “subtop” de continuer à se creuser.
Selon le professeur Christoph Kaserer, de l’Université Technique de Munich, c’est tout le contraire qui se produit puisque cette politique conduirait au renforcement de ces inégalités. Face aux plafonds financiers et aux contraintes définies par l’UEFA, les investisseurs potentiels ne voient plus d’opportunité de transformer un club plus faible financièrement en une structure capable d’être compétitive à l’échelle internationale.
L’année dernière, Thierry Granturco s’était montré dubitatif en conclusion d’un mercato estival qui dépassait déjà les limites du raisonnable. Extrait choisi :
En septembre 2009, le Comité exécutif de l’UEFA avait pourtant approuvé, à l’unanimité, le concept de FPF pour, parait-il, « le bien-être du jeu ». Selon l’UEFA, « ses principaux objectifs sont les suivants: introduire plus de discipline et de rationalité dans les finances des clubs de football ; faire diminuer la pression exercée par les salaires et les transferts, et limiter l’inflation (…) ».
L’UEFA estime en effet que le FPF a pour vocation première de stopper « la tendance inflationniste des dépenses des clubs en ce qui concerne les salaires et les indemnités de transfert ». En stoppant cette inflation, l’UEFA s’attendait à diminuer la dette des clubs de football en Europe et, conséquemment, à assainir l’économie du football.
Il s’agissait à l’époque d’un paralogisme dangereux basé de surcroît sur un raisonnement juridique fallacieux. Comme j’avais déjà eu l’occasion de le développer dans ces colonnes, la question était finalement de savoir combien de temps ce système allait tenir, en droit comme en fait. Depuis le 1er septembre, nous pouvons penser que ce système a vécu.
Certes, l’UEFA pourra toujours dire que le déficit global des clubs est entre temps passé de 1,7 milliard d’euros à 400 millions d’euros en 2014. Mais que cache en réalité ce constat? D’abord que les clubs riches ont continué à s’enrichir et à dépenser sans cesse plus, là où les clubs moins riches ont réduit leurs dépenses qu’ils ne pouvaient plus, FPF oblige, financer par l’endettement. Dit autrement, le déficit global des clubs a bien diminué, mais en creusant encore plus l’écart entre les clubs riches et les autres.
Par ailleurs, les performances sportives sont, comme nous le savons, très fortement liées aux ressources financières. Les économistes Kuper et Szymanski ont effectivement mis en évidence que le budget des clubs est corrélé à 80% avec leur classement sportif. Autrement dit, plus une équipe dépense, plus elle augmente ses chances de réaliser de bonnes performances sportives.
Dès lors, en empêchant un club de s’endetter pour dépenser, l’UEFA l’empêche en réalité de dépenser pour gagner des compétitions. Or, quand on sait que la quasi-totalité des revenus d’un club dépend de ses performances sportives, on comprend que ceux qui ont la faculté de dépenser obtiendront les meilleurs résultats sportifs et, du coup, les plus grosses recettes. Et puisque leurs revenus seront plus substantiels que ceux qui n’ont pas gagné, ils continueront à investir pour asseoir leur domination sportive…et financière ! Et ainsi, le cercle qui se voulait vertueux devient en réalité vicieux.
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