Qu’a donc fait Karim Benzema de si terrible pour mériter le traitement médiatique qui est le sien aujourd’hui ?
Il s’est peut-être compromis pour sollicitation de prostitution mineure avec Zahia, devenue célèbre depuis lors? Non, puisqu’il a été innocenté par le tribunal correctionnel de Paris le 31 janvier 2014.
Il a peut-être été arrêté plusieurs fois pour avoir conduit sans permis comme nous avons pu le lire ici et là? Non, puisqu’à chaque fois les informations révélées dans les médias à ce sujet se sont révélées inexactes.
Il a sûrement été condamné pour quelque chose, quelque part à un moment ou à un autre ?! Nous allons quand même bien découvrir un acte juridiquement répréhensible dans le parcours de ce garçon manifestement infréquentable ! Non, rien à faire, on ne trouve rien.
Ca y est ! J’y suis ! Il a mis un coup de tête à un joueur italien, ce qui lui a valu d’être expulsé et à la France de perdre la finale de la Coupe du Monde 2006. Non, ce n’était pas lui. Cela peut d’ailleurs difficilement être lui car le voyou présumé qu’est Karim Benzema n’a jamais pris un seul carton rouge de sa carrière.
Ou peut-être que malgré des accusations graves quant à son intégrité, il se soit déclaré dans la presse internationale être le seul à pouvoir remettre la FIFA dans le droit chemin, lui qui y a pourtant passé ces 17 dernières années sans y parvenir et dont la Commission d’éthique vient de demander la radiation à vie. Non, ce n’est pas lui non plus. Dommage d’ailleurs, car dans la même situation il aurait reçu le soutien du Ministre des sports et de son Secrétaire d’Etat.
Ah j’y suis ! Il a été reconnu coupable d’escroquerie et condamné à 10.000 euros d’amendes dans une affaire de paris suspects liés au match entre Cesson et Montpellier. Non plus. C’était du handball et le joueur en question ayant fait appel de sa condamnation, il reste présumé innocent et a reçu le soutien de sa fédération.
Et tout est là.
Karim Benzema est de nouveau suspecté dans une affaire judiciaire. Il a été mis en examen le 5 novembre 2015 pour complicité de tentative de chantage et participation à une association de malfaiteurs ayant pris pour cible Mathieu Valbuena. Il a été placé sous contrôle judiciaire ce qui lui interdit conséquemment tout contact avec son coéquipier. Une procédure judiciaire est donc en cours.
Mais en réalité, il est de nouveau déjà condamné médiatiquement.
Que l’on s’entende bien. Karim sera peut-être condamné par la justice. Mais il faudrait tout de même rappeler à ceux qui ont pris pour habitude de juger plus vite que les tribunaux que lors de l’affaire Zahia, le parquet de Paris avait prononcé un réquisitoire de non-lieu, non suivi par le juge d’instruction qui ordonna le renvoi du joueur devant le tribunal correctionnel de Paris. Et qu’il fallut du coup attendre plus de 3 ans pour, qu’au final, Karim Benzema soit totalement, complètement, entièrement innocenté.
Dit autrement, il va aujourd’hui, de nouveau, devoir se défendre devant un juge d’instruction. Il est mis en examen. Sa situation est donc littéralement “examinée”. Si les faits qui lui sont reprochés devaient être considérés comme relevant du tribunal correctionnel, son dossier serait alors transmis pour jugement aux magistrats le composant. Ce n’est qu’à la prononciation du jugement du tribunal correctionnel en question qu’il pourrait alors, éventuellement, être considéré comme coupable. Et devrait-il l’être, il pourrait comme le handballeur Nikola Karabatic, condamné pour escroquerie, faire appel de cette décision et continuer à bénéficier de la présomption d’innocence.
Il est donc regrettable dans un dossier dans lequel la présomption d’innocence est bafouée, dans lequel le secret de l’instruction est honteusement violé et dans lequel les droits de la défense ont conséquemment des difficultés à s’exercer de manière sereine, que notre Premier Ministre, Manuel Valls, se soit senti autorisé à porter un jugement sur cette affaire. Tout d’abord parce qu’une telle intervention est proscrite par les règlements de la FIFA.
Le fait que Nicolas Sarkozy ait reproché son intervention à Manuel Valls est d’ailleurs assez cocasse puisqu’il avait lui-même été rappelé à l’ordre par la FIFA le 29 juin 2010 après l’affaire de Knysna celle-ci déclarant alors par la voix de Sepp Blatter que “En France, c’est devenu une affaire d’Etat, mais le foot doit rester entre les mains de la Fédération française de football (FFF). S’il s’avère qu’il y a vraiment une intervention, nous aiderons la fédération. Si le problème ne peut être résolu dans la discussion, la seule solution sera de suspendre la fédération”.
Ensuite parce que notre Premier Ministre aurait dû savoir que ses propos feraient le tour du monde et porteraient donc gravement atteinte à l’image de Karim Benzema.
Or, qu’on le veuille ou non, qu’on l’aime ou pas, qu’on lui préfère Olivier Giroud en pointe de l’attaque de l’équipe de France ou pas et quoi qu’en pense Manuel Valls, l’attaquant du Real de Madrid est présumé innocent.
Il faut espérer que l’avancée dans l’instruction de son dossier permette rapidement à son contrôle judiciaire d’être levé et, du coup, que les contacts entre Mathieu Valbuena et Karim Benzema puissent juridiquement redevenir possibles. Dans quel cas Didier Deschamps et la FFF feront alors face aux scenarii suivants : celui d’un joueur soutenu par sa fédération et son entraîneur parce que présumé innocent et donc invité à continuer à jouer pour ses couleurs au moins tant qu’aucun jugement définitif n’aura été prononcé à son encontre. Ou celui d’un joueur soupçonné de complicité de tentative de chantage et de participation à une association de malfaiteurs, qui viendrait à être innocenté après l’Euro 2016 duquel il aurait été injustement banni.
Mon choix est fait.
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