La Coupe du Monde au Brésil va débuter dans quelques jours. Pour certains, c’est bien évidemment le rendez-vous à ne pas manquer. Pour d’autres, c’est aussi l’espoir de gagner beaucoup d’argent. Pour les joueurs, diriez-vous? Non, pour les parieurs. Voire pour les tricheurs!
Le nombre des matches de football truqués ne cesse de croître…
Nous avons tous entendu parler de matches de football truqués. En Allemagne, en Belgique, en Italie et même en France ou le fameux match Valenciennes-Marseille du 20 mai 1993 reste encore dans toutes les mémoires. Mais ces exemples ne font en réalité que cacher l’essentiel.
En effet, début 2013, Europol, l’office européen de police criminelle, annonçait qu’entre 2008 et 2011, 680 matches professionnels avaient, dans la seule Europe, été considérés comme suspects dont 380 avaient fait l’objet d’actes avérés de corruption.
En décembre 2013, le Parlement européen avait par ailleurs communiqué qu’Europol avait détecté 200 nouveaux cas suspects pour la seule année 2013.
Les chiffres relatifs à l’ensemble de la saison 2013/14 devraient être communiqués dans les prochains jours, mais ils ne feront vraisemblablement que confirmer une tendance qui est à la hausse depuis un certain nombre d’années. Il suffit pour prendre conscience de l’ampleur du problème de consulter l’excellente étude réalisée par l’International Centre for Sport Security en collaboration avec l’Université Paris 1, dénommée “Protecting the Integrity of Sport Competition” et publiée en mai dernier.
Les différentes Coupes du Monde, y compris la dernière en Afrique du Sud, n’ont en tout état de cause pas échappé à ce fléau si bien que nous pouvons légitimement nous demander si le pire pourra être évité au Brésil cette année.
…peut-être parce que le nombre de paris concernant le football a explosé
En effet, par rapport à la Coupe de Monde de 2010, le Parlement européen qui s’est penché sur la question, estime qu’il y a lieu de s’attendre à une augmentation du nombre de paris (principalement en ligne) de l’ordre de 60%. Cette augmentation est due en partie au développement massif, ces dernières années, de sites proposant des paris sportifs sur internet. Ils sont estimés à environ 15.000 dont 85% seraient illégaux. L’adresse de leur siège social est incertaine et l’argent qu’ils brassent n’est que difficilement traçable.
Quant aux parieurs, 70% d’entre eux proviennent d’Asie et la plupart de ceux qui participent à des activités de corruption dans le cadre de compétitions internationales (et cela vaut donc a fortiori pour des compétitions européennes) peuvent difficilement être inquiétés par la justice sans coopération des autorités de leur pays de résidence. Quand leur pays de résidence peut être identifié et c’est bien là tout le problème.
Les autorités internationales compétentes ont décidé d’agir
Europol, déterminée à combattre ce nouveau type de criminalité, a donc signé cette année des accords de coopération avec la FIFA et la semaine dernière avec l’UEFA en vue de renforcer la lutte contre la corruption dans le football professionnel.
De son côté, l’Union européenne planche aussi sur un accord avec l’UEFA en vue d’établir un système de sanctions à l’encontre des joueurs ou des entraineurs qui auraient participé à ces actes frauduleux de telle sorte qu’ils soient interdits de pratiquer partout dans le monde. Une table ronde est d’ailleurs programmée à ce sujet fin 2014.
Dès lors, même si rien n’est à exclure, nous pouvons fortement douter que les parieurs-corrupteurs tenteront d’influer sur des matches de la Coupe du Monde au Brésil. Trop d’observateurs et trop de risques de voir un acte de corruption être dévoilé pour finalement être poursuivi avec détermination par les autorités compétentes.
La corruption se déplace des championnats de division 1 aux championnats inférieurs
Les truqueurs sont donc traqués et ils le savent. Avec la multiplication des moyens de diffusion des matches de première division dans les médias et l’omniprésence des caméras, le risque de détecter un match truqué est en effet aujourd’hui beaucoup plus élevé qu’il ne l’était il y a quelques années. C’est la raison pour laquelle nous assistons, dans beaucoup de pays, à un accroissement considérable du nombre de paris sur les championnats de divisions 2 et 3 dont l’exposition médiatique est bien moindre et dont les actes de corruption les concernant sont du coup moins visibles.
Par conséquent, pour que le football reste un sport et une passion et pour qu’il continue à faire rêver, les fédérations nationales des différents pays concernés devront unir leurs efforts pour que, par exemple, une Coupe du Monde, une Ligue des Champions ou un championnat de division 1, ne puisse jamais être truqué. Mais elles devront également s’entre-aider afin que jamais les dirigeants, entraîneurs ou joueurs d’un club de division 2 qui auraient truqué un match, puissent impunément, un jour, accéder à la division 1 de leur pays.
Car le football génère trop d’argent pour que les corrupteurs renoncent à corrompre et pour certains, acteurs lambda du football professionnel qui conçoivent leurs carrières comme ne pouvant être qu’éphémères, il en génère trop peu pour qu’ils renoncent à être corrompus.
Espérons donc qu’au delà de leurs déclarations publiques, la FIFA et l’UEFA se donnent réellement les moyens d’agir sur les matches truqués dans le football professionnel. Il en va de leur crédibilité et de celle du football.
Partager cette page