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Sports et business

Mon plaidoyer pour une vraie réforme de la FIFA

1 juillet 2015

SPORT – Le traumatisme est encore là. La planète foot s’est remis à tourner après le séisme de ce que certains n’ont pas craint de nommer “l’affaire Blatter”. Les arrangements, les bidouillages entre amis, et la gestion de la FIFA ont été dévoilés au grand jour. Un mois après la crise que reste-t-il ? Un traumatisme, un besoin de transparence et de réformes qu’il faudra bien satisfaire. J’ai eu l’opportunité ces 20 dernières années de travailler pour, contre et avec la FIFA, sur un nombre conséquent de dossiers. J’ai donc pu observer son évolution aussi bien économique que politique. Alors voici mes propositions de réformes. Celle d’un connaisseur et d’un passionné.

Les règles de la FIFA relatives à la présidence de la FIFA sont sources de comportements autocratiques

Joao Havelange a passé la main à Sepp Blatter en 1998 après 24 ans à la tête de l’organisation. Sepp Blatter a été réélu il y a quelques semaines après 17 ans de présidence pour effectuer un 5e mandat de 4 ans à la tête de la FIFA.

Où voit-on une telle longévité chez un dirigeant? Si l’on compare la FIFA à un Etat, alors une telle longévité est généralement constatée dans les pays non-démocratiques. Seul un autocrate peut en effet se fondre à ce point dans le pouvoir qu’il finit par le personnaliser.

Si l’on compare la FIFA à une société commerciale multinationale, on ne trouve d’exemples d’une telle durée dans les fonctions de président que dans celles étant dirigées par leurs fondateurs. Or, Sepp Blatter n’est pas le fondateur de la FIFA. Il n’est que dépositaire d’un pouvoir qui ne lui appartient pas.

En d’autres termes, on naît rarement autocrate. On le devient par l’exercice du pouvoir et l’amour immodéré des avantages qu’il procure. C’est la raison pour laquelle dans les Etats démocratiques comme dans les multinationales ayant adopté des règles de gouvernance modernes, le nombre de mandats des présidents est limité.

La FIFA peut donc remplacer Sepp Blatter à sa tête. Elle ne réglera pas pour autant le problème de sa présidence tant qu’elle ne décidera pas de la limiter dans le temps.

Je serais d’avis de faire passer le mandat à 5 ans et d’en limiter le nombre à 2. Ceci permettrait au président élu d’organiser 2 coupes du monde tout en ayant le temps de développer les projets pour lesquels il aurait été élu.

La gouvernance de la FIFA doit être professionnalisée

Il serait également bon que la présidence fasse l’objet d’un cahier des charges quant aux qualités requises pour occuper de telles fonctions. Car sans vouloir faire offense à Figo, Ginola, Maradona et autres Zico, qui ont tous été des joueurs exceptionnels, gérer la FIFA c’est gérer une société multinationale dans un environnement extraordinairement complexe. La capacité de Michel Platini à gérer l’UEFA doit donc être vue comme l’exception à la règle qui veut que le football appartienne à ceux et celles qui le jouent, mais sa gestion devrait appartenir à ceux qui ont la capacité de le gérer.

Il pourrait en être de même du Comité exécutif et de ses membres. On n’imaginerait effectivement pas une société multinationale devant gérer des budgets de quelques 1,5 milliard d’euros par an, accepter au sein de son Conseil d’administration des administrateurs n’ayant pas l’expertise nécessaire à cette fin. Or, le système de nomination des membres du comité exécutif et autres commissions internes de la FIFA le permettent.

Il ne semble pas possible de réformer la FIFA sans la professionnaliser. Et professionnaliser la FIFA commence par la professionnalisation de ses dirigeants.

Les droits de vote n’ont pas nécessairement à être modifiés

Pour élire le Président de la FIFA et les membres de son Comité exécutif, il faut donc voter. Ces règles de vote ont été largement critiquées ces dernières semaines.

Certes, nous pouvons légitimement nous poser la question de savoir s’il est normal que les Iles Maldives puissent bénéficier du même pouvoir décisionnel au sein de la FIFA que la France. Mais répondre à cette question n’est pas aussi facile qu’il n’y paraît à première vue. Car si les Iles Maldives ont une population de 400.000 habitants représentant à peine 0,6% des 66 millions de la population française, que dire de la population française lorsque comparée aux 1,4 milliard de la population chinoise? La France ne représentant que 4,71% de la population chinoise, devrait-elle avoir les mêmes droits de vote que la Chine?

Si la FIFA devait sortir de ce précepte d’égalité de ses associations membres, ce qui serait de mon point de vue regrettable, alors le seul autre critère rationnel et pérenne d’attribution des droits de vote serait celui, quantitatif, du nombre d’habitants et/ou de licenciés. Et la France n’aurait pas grand-chose à y gagner.

Nous pourrions aussi noter qu’au sein de l’UEFA et selon l’article 18 de ses statuts, chaque association nationale dispose d’une voix. Andorre et ses 77.000 habitants tout comme la Russie et ses 144 millions d’habitants. Sans que cela ne pose a priori de problème.

De gros efforts de contrôle et de transparence doivent être effectués

Sous la présidence de Sepp Blatter, la FIFA a créé 30 commissions internes, dont l’une est en charge des finances, une autre de l’audit et de la conformité et une troisième de l’éthique. Sepp Blatter a donc pris les décisions que l’on pouvait attendre d’un Président responsable.

La commission des finances se prononce sur les décisions d’investissement et de gestion de la FIFA, la commission d’audit et de conformité se prononce sur la bonne utilisation de ces fonds et une commission d’éthique se prononce sur les problèmes détectés.

Si le système a bien été pensé, les affaires de corruption en cours montrent cependant qu’il a été défaillant. Pour plusieurs raisons. La première tient d’abord à la compétence de certains des membres de ces commissions pour traiter des questions techniques relevant de leurs compétences. On ne se décrète pas financier ou auditeur. La deuxième tient au fait que ces commissions se sont avérées ne pas être suffisamment indépendantes de la présidence. Ceci est apparu clairement lors de l’imbroglio du traitement du rapport Garcia par la commission d’éthique de la FIFA.

Par conséquent, en sélectionnant mieux les membres de ces commissions internes et en leur assurant réglementairement une totale indépendance de la présidence, le contrôle des activités de la FIFA devrait en ressortir renforcé.

A ces mesures pourraient s’en rajouter deux autres : la première consisterait pour la FIFA à faire auditer les activités qu’elle finance au sein des associations membres, par des auditeurs qu’elle serait seule à choisir. La deuxième viserait à exiger du président la plus grande transparence sur les revenus tirés de la FIFA comme sur ses autres revenus. Car il est anormal aujourd’hui que les émoluments de Sepp Blatter restent confidentiels.

Ces réformes auraient l’avantage d’être simples et non controversées. Elles auraient également un impact fort et immédiat sur le fonctionnement de la FIFA.

Car le mal dont souffre cette organisation est profond et ne saurait être traité par des “réformettes”. Si tel devait être le cas, d’autres autocrates continueront à diriger le football mondial.

Après le temps de la croissance, c’est aujourd’hui pour la FIFA, le temps de la transparence.

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