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Pour indemniser la victime d’un tacle, le juge civil peut interpréter les lois du jeu

27 avril 2018

En février 2011, lors d’un match qui oppose deux clubs du Puy de Dôme, un joueur tacle un adversaire par derrière alors qu’il n’avait pas le ballon et lui brise le tibia. La blessure est intentionnelle. Tous les témoignages le confirment.

Au plan disciplinaire, l’auteur de l’agression est aussitôt suspendu par la Fédération Française de Football (FFF) pour 12 matches et son club est condamné à payer une amende de 85 euros. La victime porte également plainte au pénal, mais le Ministère public classe l’affaire, au motif que les faits de violence n’apparaissent pas suffisamment établis. Tout semble devoir s’arrêter là. Le joueur-tacleur et son club respirent.

Mais un grain de sable vient gripper le mécanisme. Car le joueur agressé décide de ne pas en rester là et se tourne vers la juridiction civile. Il obtient d’abord en référé l’organisation d’une expertise médicale. Puis, fort de celle-ci, il assigne son agresseur, le club de ce dernier et l’assureur de ce club devant le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Clermont-Ferrand, en vue d’obtenir une indemnisation pour le préjudice subi.

Violence volontaire et délibérée

Cette stratégie paye, puisque par un jugement en date du 13 janvier 2016, le TGI de Clermont Ferrand condamne solidairement le footballeur-tacleur, son club et son assureur à payer au joueur-victime une somme de 24 463,70 €, à titre de dommages et intérêts. Elle les condamne également à payer à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) du Puy-de-Dôme la somme de 20 640,92 €.

Le TGI considère, en effet, que le tacle pratiqué par le joueur est un fait de violence volontaire et délibérée excédant les règles, les risques et les aléas de la pratique du football. Par ailleurs, les juges relèvent que les sanctions disciplinaires prises par la FFF à l’encontre du joueur et de son club n’ont pas fait l’objet d’un appel de leur part, ce qui constitue une admission de culpabilité.

Le joueur-tacleur et son club font appel du jugement. Mais la Cour d’Appel de Riom, par un arrêt du 29 novembre 2017, douche leurs espoirs. Elle confirme dans leur intégralité les sanctions prises par le TGI de Clermont-Ferrand. Elle va même plus loin, en estimant qu’il appartient au juge judiciaire d’examiner si le dommage résulte, ou non, d’une violation des règles du jeu et se reconnaît le droit de les interpréter.

Des sanctions disciplinaires insuffisantes

Pourquoi une telle sévérité ? La Cour d’appel de Riom constate que les témoignages écrits versés aux débats laissent apparaître, d’une manière précise et concordante, que l’agresseur effectue le tacle litigieux par-derrière et en visant la jambe de la victime, alors que celui-ci n’a pas le ballon. D’autres témoignages, provenant de co-équipiers, en attestent également.

Elle considère donc que, selon les « lois du jeu 2010/2011 » édictées par la FIFA et applicables au moment des faits, le tacle constitue une faute grossière qui met en danger l’intégrité physique de l’adversaire. Il s’agit bel et bien d’une agression et non d’un geste sportif.

La Cour d’appel estime donc, malgré le classement sans suite de la plainte par le Ministère public et malgré les sanctions disciplinaires déjà prononcées, que les faits jugés ouvrent droit à réparation. Autrement dit et en conclusion : quoiqu’en pense la FFF, quoiqu’elle dise et même si le Ministère public décide de ne pas poursuivre, une affaire n’est pas terminée tant que le juge civil ne s’est pas prononcé. Et la justice finit toujours par rattraper le joueur-tacleur.

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