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Coupe du Monde: ce que la morsure de Suarez nous apprend sur les sanctions disciplinaires de la FIFA

2 juillet 2014

L’un des faits marquants de ce Mondial aura été et restera la suspension de l’attaquant uruguayen Suarez. Le meilleur buteur de la dernière saison outre-Manche a été sanctionné pour avoir mordu le rugueux défenseur italien Chiellini. Bien que celui-ci ait d’abord démenti avoir commis cette agression (avant de finalement la reconnaître et de s’excuser publiquement hier) et bien que le peuple uruguayen, en ce compris son chef d’Etat, ait fait bloc derrière lui, son passé de « serial mordeur » et les images du match n’ont pas plaidé en sa faveur.

L’arbitre n’avait manifestement rien vu de cette agression mais les instances de la FIFA ont visionné les images après match et ont infligé une très lourde sanction à Suarez. Il a ainsi écopé de 9 matches de suspension et de 4 mois d’inactivité en ce compris avec son club, Liverpool. Son sponsor Adidas aura vu de son côté les mêmes images puisqu’il a décidé de mettre fin, avec effet immédiat, au contrat de sponsoring qui le liait au joueur.

On ne peut que soutenir cette décision de la FIFA, car l’acte commis par Suarez est d’une violence inouïe et tellement… anti-football. Car soyons sérieux ! On peut tacler un adversaire et mettre son intégrité physique en danger. On peut donner des coups de coude au visage ou on peut s’essuyer les semelles sur les jambes de son vis-à-vis : on obtiendra tout au plus un carton jaune, voire un carton rouge si l’agression est spectaculaire. Sauf blessure grave du joueur adverse, on s’en sortira en tout état de cause avec un simple avertissement ou avec un ou deux matches de suspension selon les compétitions.

Il y aurait par conséquent beaucoup à dire sur la proportionnalité des sanctions pour violence dans le milieu du football. Mais en l’occurrence, nous ne ferons pas le procès à la FIFA d’avoir lourdement sanctionné Suarez. Car il faut ardemment souhaiter au meilleur buteur de la dernière saison outre-Manche de mettre ces 4 mois d’absence de compétition à profit pour rechercher un soutien psychologique dont il a manifestement le plus grand besoin.

Blaise Matuidi, le milieu de terrain du PSG et de l’équipe de France, le sait mieux que quiconque. Il a en effet sérieusement blessé le nigérian Onazi lors du 8e de finale France-Nigéria, et n’écopa que d’un carton jaune. Onazi quant à lui quittera le Brésil une cheville dans le plâtre.

Il y aurait par conséquent beaucoup à dire sur la proportionnalité des sanctions pour violence dans le milieu du football. Mais en l’occurrence, nous ne ferons pas le procès à la FIFA d’avoir lourdement sanctionné Suarez. Car il faut ardemment souhaiter au joueur uruguayen de mettre ces 4 mois de suspension à profit pour rechercher un soutien psychologique dont il a manifestement le plus grand besoin.

Claudio Sulser, le Président de la Commission de discipline de la FIFA, rajouta d’ailleurs pour ceux qui en douteraient qu'”un tel comportement ne peut être toléré sur un terrain de foot et en particulier pendant une Coupe du monde quand les yeux de millions de personnes sont braqués sur les vedettes sur le terrain”.

Dont acte: mordre son adversaire devant des millions de téléspectateurs, ce n’est pas admissible. La FIFA l’a dit, nous avons pu l’entendre sur tous les plateaux TV et nous avons pu le lire dans toutes les langues. C’est donc bien que cela doit être vrai.

Mais, alors, est-il plus tolérable de voir un joueur simulé une faute pour obtenir un bon coup-franc ou un penalty ? A priori non, car si le joueur simule mal et que l’arbitre détecte sa tentative de le tromper dans son jugement, il peut être sanctionné d’un carton jaune. C’est donc bien que la simulation est contraire aux règles du jeu.

Et pourtant…

Et pourtant, comme nous l’avons déjà écrit dans ces colonnes, Fred, l’attaquant Brésilien a trompé l’arbitre durant le match d’ouverture de la Coupe du Monde contre la Croatie et a obtenu un penalty imaginaire. Le match bascula, le Brésil remporta 3 points précieux et la Croatie fut éliminée au terme des matches de poules.

Selon la FIFA, ce match a été regardé par 42,9 millions de téléspectateurs. Il est donc peu de dire que nombreux sont ceux qui ont vu Fred tricher en direct.

Quelques jours plus tard, les Pays-Bas ont éliminé de valeureux Mexicains en 8ème de finale grâce à un penalty de nouveau inexistant. Robben plongea dans la surface de réparation à la 90+4 ème minute et Marquez, le défenseur Mexicain injustement accusé de l’avoir déséquilibré, reçu même pour sa peine un carton jaune pour une faute qu’il n’avait pas commise.

Robben est un joueur extrêmement talentueux. Mais c’est également un attaquant expérimenté et intelligent. Il sait que ce penalty aura été disséqué sous tous les angles par les différentes chaînes de TV du monde entier avant même qu’il n’ait eu le temps de remonter ses chaussettes. Si bien qu’à peine sorti de la douche, il déclara sans sourciller aux journalistes qui l’interrogeaient, avoir volontairement « plongé » dans la surface de réparation pour obtenir ce penalty. Pourquoi mentirait-il ? Tout le monde aura vu les images, tout le monde aura vu qu’il a simulé la faute et tout le monde sait bien que cet acte de tricherie comme le fait de le reconnaître resteront impunis.

Il faut peut-être une nouvelle fois le marteler en utilisant d’autres termes: il déclare publiquement, tout de suite après le match, avoir triché, et tout cela passe comme une lettre à la poste !

La FIFA n’a pas réagi et ne réagira pas, comme si finalement tricher faisait partie du jeu. Si le joueur est pris sur le fait, il peut prendre un carton jaune. Mais si l’arbitre ne le voit pas, les membres de la Commission de discipline de la FIFA se refusent à utiliser les images pour prononcer des sanctions a posteriori contre le joueur ayant triché. Ce qui vaut donc pour la morsure de Suarez ne vaut pas pour un acte d’antijeu, même s’il est d’une ampleur telle qu’il change le cours d’un match.

Ce n’est pas sérieux, ce n’est pas responsable et ce n’est pas équitable.

Et cela va plus loin. Car on ne trouvera pas plus de commentateurs télé pour condamner la simulation. Ceux-ci se limiteront à analyser l’action au ralenti pour estimer si le penalty était ou non justifié. Quand il ressort du visionnage des faits que l’arbitre a fait une erreur de jugement, il sera alors souvent vilipendé. Mais le joueur l’ayant trompé, ayant triché, n’est quant à lui jamais critiqué. Et vous lisez bien : « jamais » !

Il faut croire que comme l’avait dit en son temps, maladroitement mais très honnêtement, Mickaël Landreau, actuel troisième gardien de l’équipe France au Brésil, tomber fait maintenant partie de la panoplie d’un bon attaquant.

Quiconque aura vu des matches de jeunes, voire de très jeunes amateurs de football, saura que la simulation, donc la tricherie, fait des adeptes. Comment dire à un joueur de 10 ans qu’il doit aller au bout de son action plutôt que d’essayer de tomber dans la surface de réparation si Fred, Robben et leurs amis plongeurs font gagner des matches à leurs équipes en faisant la même chose?

Et que dire d’un sport dont les fondamentaux se veulent avoir valeur d’exemples, si la tricherie est disséquée, analysée mais qu’elle reste impunie pour ne pas dire récompensée ?

Alors qu’on arrête de promouvoir naïvement les soi-disant valeurs du sport et leurs bienfaits sur l’éducation de nos enfants. Que ceux qui ont aujourd’hui les pouvoirs de rendre au football ses vertus originelles prennent leurs responsabilités.

Car que M. Sulser, le Président de la Commission de discipline de la FIFA, ne s’y trompe pas: les jeunes amateurs de football de tous pays braquent effectivement leurs yeux sur les vedettes du Mondial. Mais ils n’y voient pas que des morsures.

Nous devrions donc pouvoir nous attendre à voir la FIFA promouvoir bientôt des séances techniques de ”plongeons dans la surface” et la FFF mettre ”les chutes en vue de l’obtention d’un penalty” dans le programme du DEPF (Diplôme d’Entraîneur Professionnel de Football).

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