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La Coupe du monde 2022 au Qatar: la FIFA fait le beau temps

26 février 2015

FOOTBALL – Une Task Force de la FIFA s’est réunie mardi au Qatar en vue de déterminer ce qui pourrait être le calendrier de l’organisation de la Coupe du monde au Qatar, prévue en 2022. C’est sans surprise que le Secrétaire général français de la FIFA, M. Jérome Valcke, a communiqué à l’issue de cette réunion que ladite Task Force recommandera au Comité exécutif de la FIFA d’organiser cette Coupe du monde en novembre et décembre 2022.

Ce faisant, la FIFA fera montre de toute sa puissance en imposant finalement au monde entier une décision à tout point de vue inique.

En arrêtant les dates de la Coupe du monde au Qatar, la FIFA enterre d’abord les soupçons de corruption ayant pesé sur son attribution

Secouée par une affaire de corruption sans précédent dans l’histoire du football international, documentée par des journalistes indépendants ainsi que par son propre comité d’audit présidé alors par M. Garcia, la FIFA aura finalement su faire le dos rond et attendre que tout cela passe. Et le feu médiatique s’est effectivement éteint. De telle sorte que plus personne ne se demande si l’attribution de la Coupe du monde 2022 doit faire l’objet d’un nouveau vote. Seule reste posée la question de savoir quand elle sera organisée.

La réputation de la FIFA en a, certes, irrémédiablement souffert. Mais alors qu’une telle affaire aurait mené dans un Etat démocratique, voire dans une société commerciale internationale -la FIFA ayant quelque part les attributs de l’un comme de l’autre- au rejet et au départ de ses dirigeants, à la FIFA, rien de tel. Non seulement les dirigeants restent en place, mais ils seront même réélus le 29 mai prochain. Car il ne fait effectivement aucun doute que le système électoral, mis en place au sein de cette organisation, permettra à M. Blatter d’obtenir un cinquième mandat à la tête du football mondial.

En optant pour l’hiver 2022, la FIFA reconnaît son erreur initiale d’avoir pu attribuer l’organisation d’une compétition estivale au Qatar

Attribuer la Coupe du monde 2022 au Qatar n’était pas une évidence. Outre le fait que l’Australie, la Corée du Sud, les Etats-Unis et le Japon s’étaient également portés candidats, la question posée aux votants d’alors était de savoir comment organiser une compétition en juin et juillet 2022 au Qatar alors même que les températures y avoisinent les 50 degrés.

Il serait faire injure aux représentants des différentes fédérations nationales siégeant à la FIFA de penser que cet élément d’appréciation des dossiers des candidats ait pu échapper à leur vigilance. D’autant plus que le cahier des charges était à cet égard très clair et ne visait qu’une compétition estivale.

En tout état de cause, corruption de certains ou pas, la Coupe du monde 2022 fut attribuée au Qatar. Sauf que ce qui devait arriver arriva et qu’il fut finalement considéré plusieurs mois après le vote qu’organiser une telle compétition dans ce pays ne pouvait pas se concevoir en période estivale. La FIFA fait donc de nouveau fi des critiques, moqueries et autres menaces, et constante dans l’erreur, s’apprête à décider le mois prochain qu’il conviendra d’organiser cette compétition en novembre et décembre 2022.

Quelles sont les conséquences de ce choix pour les acteurs du football?

Ce choix est lourd de conséquences pour les fédérations nationales, les ligues de football professionnel, les clubs et les joueurs.

En haut de la pyramide, les fédérations nationales, membres de la FIFA à qui elles ont délégué le soin d’organiser le football à l’échelle internationale, sont liées par ses statuts et ses règlements. Elles lui ont donné compétence pour organiser, entre autres, la Coupe du monde tous les quatre ans. Elles ont adopté les statuts de la FIFA et pris part au vote sur l’attribution de celle à organiser en 2022. Elles peuvent regretter qu’à l’égard des circonstances, la FIFA ne procède pas à un nouveau vote. Mais celle-ci n’y étant juridiquement pas tenue, elles sont dans l’impasse et devront se soumettre à l’inéluctable. Elles devront d’ailleurs se coordonner avec les ligues de football professionnel auxquelles elles ont, dans de nombreux pays, délégué l’organisation du football professionnel, se réservant celle du football amateur et la gestion des équipes nationales.

Fédérations nationales et ligues professionnelles auront ainsi la lourde tâche de modifier les calendriers de toutes les compétitions nationales. Ainsi, pour la France, la FFF et la LFP devront partir du constat que même si la Coupe du monde au Qatar devait être organisée entre le 26 novembre et le 23 décembre 2022 comme la BBC l’a laissé entendre mardi, ce ne serait pas moins de cinq semaines sans journées de championnat, tours de Coupe de France, voire de Coupe de la Ligue qu’il faudrait pouvoir absorber. Car outre les quatre semaines de Coupe du monde, il faudra alors rajouter un minimum d’une semaine de rassemblement préalable des joueurs de l’équipe de France en vue de préparer la compétition.

Ceci amènera sûrement les instances dirigeantes françaises à écourter la saison 2021/22 de telle manière à pouvoir reprendre la saison 2022/23 en juillet plutôt qu’en août. Et cela les poussera vraisemblablement à multiplier les matches en semaine entre janvier et février 2023, à un moment où les terrains sont particulièrement mauvais et où les organismes des joueurs sont mis à rude épreuve. Tout ceci sachant de surcroît que la FFF et la LFP devront également tenir compte des modifications du calendrier des compétitions européennes (Ligue des Champions et Ligue Europa), auxquelles des clubs français participeront, que l’UEFA, dirigée par Michel Platini, devra également établir.

Bref, un vrai casse-tête qui aura au final, plus bas dans la hiérarchie du football, un impact sérieux sur les clubs et leurs joueurs puisqu’ils devront bien entendu respecter le calendrier de la FIFA, comme ceux établis par leurs fédération et les ligues de football professionnel.

Quelles sont les conséquences pour les autres acteurs de la Coupe du monde?

D’autres impacts sont cependant également à prévoir.

Le premier pourrait concerner la FIFA en tant qu’organisation, puisque l’Australie, candidate malheureuse à l’organisation de la Coupe du monde 2022, avait fait savoir qu’elle demanderait réparation si la compétition devait être organisée en hiver. Même si M. Blatter a entre-temps rencontré les dirigeants australiens et déclaré que l’Australie mériterait de se voir octroyer une Coupe du monde après celle de 2022, une action judiciaire du gouvernement australien contre la FIFA n’est pas exclue.

Nous avions également déjà évoqué dans ces colonnes la possibilité de voir certains diffuseurs et autres partenaires commerciaux de la FIFA remettre en cause leurs engagements, et ces menaces pourraient bien se préciser. L’hiver 2022 sera effectivement aussi celui des JO d’hiver et certains annonceurs, présents sur ces deux événements planétaires, ne sauraient payer le même prix si leur visibilité devait être moindre, considérant que certains spectateurs d’une compétition seront nécessairement perdus pour l’autre.

Au final…

La décision d’octroyer la Coupe du monde 2022 au Qatar a d’abord donné naissance à une terrible crise de gouvernance et d’image pour la FIFA dans la mesure où tout laisse penser qu’elle a été entachée de corruption. Elle fut ensuite vue sous un angle différent, le milieu du football professionnel se demandant comment leurs dirigeants, qu’ils traitaient alors “d’amateurs illuminés”, avaient pu une seule seconde penser pouvoir organiser une telle compétition au Qatar en plein été.

Aujourd’hui, il nous faut la voir différemment. Le temps d’évaluer et de juger est passé. Il faut dorénavant travailler sur les conséquences de ces décisions et se poser les bonnes questions.

Les premières tiennent à la gouvernance de la FIFA. Il est profondément anormal que toute la lumière n’ait toujours pas été faite sur les soupçons de corruption ayant accompagné l’octroi de la Coupe du monde 2022 au Qatar. Les statuts de la FIFA devraient être modifiés pour que plus jamais de tels faits ne puissent être traités confidentiellement par le Président et des comités internes non-représentatifs des fédérations membres.

Il semble également opportun de revoir le processus d’élection du Président de la FIFA, de telle manière à limiter le nombre de ses mandats, à pondérer les voix des fédérations participant au vote et à éviter le clientélisme auquel les règles actuelles donnent lieu.

Finalement, il serait bon que le football redevienne la préoccupation majeure de la FIFA. Car à trop vouloir se préoccuper de son organisation, on en oublie le jeu et ceux qui le jouent.

Certains ne manqueront d’ailleurs pas de relever que la FIFA est l’organisation qui a décidé d’une manière extrêmement ”flexible” d’organiser une Coupe du monde au Qatar en plein été avant de déplacer cette même compétition en hiver, mais que c’est aussi celle qui a été extrêmement inflexible en refusant il y a quelques semaines à Ben Arfa de signer à Nice, sous prétexte qu’il avait joué un match (de trop) avec les jeunes de Newcastle.

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